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Vers d'autres photographies :
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C'est un mauvais rêve. Un mauvais film.
Ils ont parcouru quelques milliers de kilomètres et ils sont là,
Ici, en France, à quelques heures de Paris, si prés de leur but, l'Angleterre.
Ils marchent depuis des jours.
Dorment dans des forêts.
Mangent quand ils peuvent.
Aujourd'hui il ne pleut pas.
Hier, il a plu beaucoup.
Ce matin, c'est comme une fin du monde.
La fin de notre monde
Et cette fin du monde va vite.
La semaine dernière, un bébé est mort au moment d'embarquer.
Le 3 septembre, 14 jeunes femmes sont tombées dans l'eau et ont perdu leur vie
Chaque semaine à présent, des personnes meurent ici sur ce littoral des hauts de France.
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Ce matin, à Audresselles
l'eau les vagues, la noyade n'est pas loin.
Sous les embardées, au moment de monter dans l'embarcation
Le froid qui pince, les habits qui font des poches d'eau.
Ce qui reste : des cris, un puit d'angoisse, des bras qui se serrent.
Au moment d'embarquer, tout se mélange
Au moment de partir, l'instant est fragile et fracassant.
Ce qui reste : goulée d'air, battements du coeur.
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On pourra condamner mille passeurs, défaire milles réseaux,
mettre mille caméra, mille barbelés
On pourra brandir des murs de certitudes sur l'insécurité,
sur la nécessaire protection des frontières
On pourra nous faire croire que le problème va se résoudre ainsi.
Les états se pensent innocents
Alors qu'ils rendent ça possible :
En dressant des frontières, en créant la clandestinité qu'il dénonce.
En traquant des personnes, hommes, femmes, enfants
Oui, les Etats rendent ça possible :
ce mauvais film, ce mauvais rêve.
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Hier, vendredi, sur le littoral du Nord Pas de Calais, en France
Pas loin de chez nous, pas loin de chez vous,
une dizaine de tentatives de traversée vers l'Angletterre ont eu lieu.
Ici, en France hier, pas loin de chez nous, pas loin de chez vous
des femmes, des enfants, des jeunes, des vieux, des afghanes, des soudanais
des iraniens, des birmans,
sans autres solutions d'asile, ont risqué leur vie.
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Il est pourtant possible de faire autrement.
Faire autrement pour que cette frontière cesse d'éprouver les corps
et de tuer les gens.
Il est possible de ne plus dire que l'on veut "réduire les flux des entrées",
et il est possible de cesser de soutenir cette idée de préférence nationale
parce qu'on s'est inventé un ennemi imaginaire.
Il est possible de faire cesser toute cette brutalité aux frontières.
Cesser de diffuser du mensonge sur les personnes en exil
Cesser de voir l'autre comme un intrus.
Cesser de bloquer les frontières au détriment du respect du droit à la vie
Les associations sur le terrain oeuvrent chaque jour.
Elles sont témoins de ce drame humain généré par des politiques inhumaines.
Elles tendent des mains, réchauffent des coeurs.
Voilà la leçon est simple encore une fois :
nous sommes libres de décider,
de choisir notre camps,
de collaborer avec une politique abject
ou de considérer que toutes les vies ont la même valeur
et de résister pour protéger ceux qui doivent l'être.
Sur le littoral du Nord de la France, dans chacune de nos villes
nous pouvons nous laisser affecter par la vulnérabilité de toutes ces vies menacées et sans recours, :
agir, soutenir, porter secours, témoigner.