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Les enfants jaillissent, construisent et révèlent, défont et sautent en l'air, mangent des glaces de bon coeur et des frites aussi. Les enfants sur les terrasses en bois, dans l'eau c'est sûr, les enfants comme des bonbons acidulés, la tête en forme de poire, la tête en forme d'atomiseur, les enfants sur le parquet font des pas de danse, lancent des invectives, on croirait des sauterelles maladroites ou des petits rats à l'opéra. Les enfants jouent aux enfants, se posent parfois l'air un peu grave, anticipent faut pas l'école demain. Les enfants se tiennent par la main, font des sacs à main avec des paillettes, s'allongent sur des édredons entre les chats, dorment dans les caravanes. Ils regardent leur peau au soleil, se font des confidences, se racontent en long et large pas travers. C'est qu'il a frappé fort le petit week end entre enfants. En gris d'argent, les enfants copains quand ça se retrouve, quand ça se redécouvre, toujours neufs, c'est pyrotechnique.
Rédigé à 07h17 | Lien permanent
..J’étais en mode daddy
Dans les couches de mon bout d’choux
J’tapais sur des bouts d’caoutchouc
J’avais rangé l’baggy
En mode papy, charentaises
Le rap entre parenthèses
La quarantaine, je reviens dans l’game
C’est pas le tact mais le tacle a l’anglaise
Trop envie d’kicker comme une envie d’niquer
J’suis sentimental pis ça part en baise
Zo! Je renais de mes cendres
Et vous tire vers le haut
Ne nous faites pas redescendre
Allez vous faire liker
Moi j’ai l’MIC dans la peau comme une tache de naissance
Des bourreaux réputés
Des hommes exécutés
J’ai beau être éduqué
Ma rage est décuplée
J’ai shooté l’shérif
Mais j’aurais dû shooter l’député
J'vais pas m'faire sauter pour un paquet d'vierges
Elles sont djà au taquet prêtes à s'faire sauter
Plutôt qu'd'aller voter faut leur botter l'derche
Peste choléra ou coqueluche
Ces fils de pute ont buté Coluche
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https://laboocle.bandcamp.com/track/goliath-feat-f-lix-petit
Rédigé à 00h37 | Lien permanent
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Rédigé à 23h48 | Lien permanent
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"Se libérer, ne croyez surtout pas que c’est être soi-même. C’est s’inventer comme autre que soi. Autres matières : flux, fluides, flammes… Autres formes : métamorphoses. Déchirez la guangue qui scande “vous êtes ceci”, “vous êtes cela”, “vous êtes…”. Ne soyez rien : devenez sans cesse. L’intériorité est un piège. L’individu ? Une camisole. Soyez toujours pour vous-mêmes votre dehors, le dehors de toute chose."
Alain Damasio. La zone du dehors.
Rédigé à 07h38 | Lien permanent
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Tenir tête
aux grands chagrins silencieux
aux araignées des baignoires
aux travaux pour agrandir les voies
tenir tête et laisser aller la mienne
sur l'épaule du printemps qui s'achève
aux certitudes dégueulasses
aux regards méprisants de ceux qui sont sûrs de savoir
aux images retouchées,
tenir tête et nouer ces bords d'un monde ancien
comme les quatre coins d'un torchon sale,
(...)
tenir tête aux têtes baissées.
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Extrait d'un poème de Cécile Coulon.
Noir volcan.
Editions Le Castor Astral.
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oui, ELLES m'aident
à encore toujours
tenir tête
je leur en suis tellement reconnaissant.
Rédigé à 22h03 | Lien permanent
"Dans notre relation enfant-adulte, il est temps de basculer d’un système basé sur la domination à un écosystème d’interdépendances. Pourtant, les conditions matérielles ne sont actuellement pas réunies. Quels premiers pas pour déblayer et construire un milieu propice ? Et surtout, quel sens à un changement si profond en ces temps de fer ?
Dans l’école où je travaillais, sur une étagère de la salle d’étude, dans une étroite pochette cartonnée, entre une frise des siècles et quelques cartes historiques, sont glissés de discrets petits livrets illustrés. Sur l’un d’eux, un dessin représente la «transmission par voie orale». C’est une aquarelle montrant un vieil homme contant une histoire à plusieurs enfants, captivés, envoûtés par son récit, qu’il relate probablement d’une voix vibrante. L’ambiance est mystérieuse à la lueur d’un feu de camp qui ouvre l’imagination, nourrit les rêves, et, tout en parlant d’un passé dont on ne sait s’il est réel, un feu qui ouvre un futur... un grand éventail de possibles.
Ainsi j’aime m’asseoir au sol, conter des histoires aux enfants nouveaux ou déjà grandis, une histoire de la vie, des humanités... Conter la beauté et le sauvage, nommer, ouvrir, questionner ou suspendre. Jamais nous ne cessons de grandir, comme la vie qui transforme la mort en renaissance, en un morphing continuel. L’enfant est un géant à ce jeu. Il est ce mystérieux funambule sur le fil de son histoire, touchant et goûtant, apprenant à jongler avec les idées, s’exerçant sans complaisance à manier les concepts, alors que l’ancien, se croyant sage, se proclamant adulte, a stoppé son mouvement, son jeu, pour figer ses connaissances en certitudes.
Mots empruntés
Le mot «enfant» est emprunté au latin infans, «qui ne parle pas», lequel se rattache à une racine indo-européenne signifiant notamment «éclairer».
Le mot «adulte» est emprunté au latin adultus, participe passé de adolescere (cf. adolescent), qui signifie «grandir».
L’enfant qui guide par ses explorations libres, tel un éclaireur passionné, permet à l’aîné de grandir. Celui qui grandit partage les mots issus de ces explorations ; l’enfant en construit des connaissances. L’interdépendance qui relie ces êtres est bâtie d’amour, cet instinct primordial qui a permis à l’humanité de vivre parmi les autres êtres vivants. J’y tiens. Je persévère à y croire.
Nous sommes tous dépendants : d’autres personnes, d’êtres vivants, de systèmes écologiques, économiques, politiques... Nous avons à déconstruire le mythe de l’autonomie individuelle complète, intégrale. Nous sommes tous interdépendants. Si l’une des relations assurant une partie de notre survie disparaît, c’est tout l’ensemble qui en est bousculé.
La perspective d'un effondrement systémique remet en lumière ce système en recherche permanente d’équilibre nouveau.
Le nouveau-né est autant dépendant de ses parents qu’un adulte de quelque chose, et pas plus. Simplement autrement. Le premier ne peut survivre sans l’attachement fort à sa mère et à sa tribu. Le second ne peut survivre sans ses connaissances... ni sa tribu.
Le temps de l’ignorance
L’enfant, notre système actuel le préfère innocent, mignon, avec un aspect fragile. Le mot «innocent» est emprunté au latin innocentis, «qui ne fait pas de mal, inoffensif». Tant qu’il est innocent, l’enfant ne (nous) fera pas de mal ? En fait, plutôt qu’innocent, il me semble plus juste de dire «en état d’ignorance». L’ignorance s’efface lorsque arrive la possibilité d’expérimenter, d’apprendre, de constituer des connaissances.
Un enfant en liberté de s’informer acquiert la capacité de développer son esprit critique et donc de choisir autre chose que ce que lui propose son environnement. De sortir des cases. Initié, en souverain de son royaume, il devient responsable de ses actes, à hauteur de sa conscience, comme nous le sommes, à hauteur de notre conscience.
Un enfant en liberté de s’informer acquiert la capacité de développer son esprit critique et donc de choisir autre chose que ce que lui propose son environnement.
Nous pouvons ainsi questionner le statut, la responsabilité et la justice des mineurs avec ce nouvel éclairage. Qu’en serait-il d’une vague d’enfants ayant la liberté de s’informer, de se former par initiation, soutenus par des adultes inspirants, au service de leurs potentiels, réunis pour créer ensemble une société responsable, juste ? J’en rêve.
De manière plus large qu’une simple école, espace limitant, ouvrons-lui donc l’accès à des espaces d’exploration tels que des bibliothèques réunissant de multiples ouvrages scientifiques, philosophiques, encyclopédiques, et des salles d’études riches en matériel d’expérimentation... tout autant que nous lui ouvrons l’accès aux forêts sauvages, aux bords des ruisseaux, à la vie partagée avec les animaux non-humains.
Un mot parlé ou tracé dans un livre incarne une histoire, des mémoires, témoigne du passé, prépare un futur. Le son enrobe ou choque, soutient ou délaisse.
Permettons-nous une exploration savoureuse par ce que le linguiste Alain Rey appelle un «baptême du monde par les mots». Du choix de nos paroles et de nos écrits découle un «à venir».
Imagination, source d’innovation
L’imagination est la faculté d’inventer de nouvelles images, de créer en combinant des idées, tandis que l’imaginaire concerne ce qui n’existe que dans notre imagination.
Observons au quotidien comment nous avons tendance à plonger l’enfant dans notre imaginaire par le biais de croyances. Ce monde intérieur nous appartient et enferme l’imagination de ces enfants à l’intérieur des limites de ce que notre cerveau crée.
Et si l’histoire de la langue modèle et nourrit toute culture, un effondrement de notre civilisation thermo-industrielle nous amène à repenser aussi le vocabulaire que nous employons, par lequel se structurent notre pensée et donc nos relations, pour ouvrir de nouveaux possibles. Innover.
(...)
Choisir de créer un autre nouveau
Une relation qui se nourrit d’abus et de non-dits est vouée à l’échec, dès le départ. Alors, quel sens cela a-t-il d’endommager cette relation qui peut être épanouissante ?
Si je souhaite donner des chances à cette sérénité dans ma relation avec l’enfant, en équanimité, je lâche l’ascendance sur lui et j’apprends à accueillir la quiétude de la relation d’entraide. Je ne peux en faire l’économie. Ce n’est pas simple à faire lorsque ma propre enfance est imbibée de ce mode de contrôle inconscient par l’adulte.
Perpétuer ne signifie pas éternellement répéter, mais bien «éternel nouveau». À chaque génération, des maux, des paroles, des comportements semblent se transmettre. La perpétuation de ces violences n’est pas inéluctable. Nous pouvons voir que chaque génération a choisi de créer à nouveau quelque chose de connu. Il nous est donc possible de créer un autre nouveau... une relation basée sur l’amour.
Basculement hors de la tribu
Pour cause de troubles de santé, voilà deux mois que je n’entends plus les bruits de l’école. Un silence remplace les paroles des enfants. Deux mois que mon esprit garde l’image de leurs yeux pétillants, avides de découvertes, de leurs mains agiles en manipulations diverses. Ce matin, je prends conscience que, sans leur présence quotidienne, j’ai l’impression de ne plus grandir. D’un coup, les mots posés, là, sur ces pages, prennent une autre saveur.
Je ne peux vivre sans ma tribu. L’enfant en fait partie. Ce fils, cette fille de la vie, qui s’offre tant et qui m’offre tant. Je suis à son service. Je mets mon expérience au service de la puissance de ses potentiels. Il n’y a que cela qui est. Cet amour qui nous traverse est la seule vibration qui puisse créer cela : l’ouverture, la quiétude, le plaisir d’être ensemble, la chaleur du partage, le courage de traverser l’épreuve, nourri de se sentir soutenu et de soutenir l’autre. Créer un nouveau monde, en soi et autour de nous.
Le vide de l’absence, par ces mois d’arrêt loin de l’école, ce mal-être que je ressens. Je comprends enfin. Sans l’enfant, il y a une perte de sens. Pour qui créer un autre monde si ce n’est pour lui ?
L’enfant est l’élément fondateur de la tribu. C’est lui qui nous guide, nous éclaire sur le chemin à explorer. C’est lui qui nous rappelle que seul l’amour est source d’attachement, de confiance et de dignité. La question de ce que nous voulons vivre dans la relation avec l’enfant est au centre de tout. À chaque instant.
S’inspirer des peuples racines, inventer des rituels, apprendre à dire ce que notre corps crie, apprendre à écouter vraiment, profondément, apprendre à tendre la main, apprendre à vivre ensemble et à accueillir ce qui nous bouleverse au plus profond. Un chantier à entamer en soi, ici, entre nous, avec les autres.
Alors, toi, lecteur, lectrice, viens donc t’asseoir au coin du feu. Là, au chaud, près des flammes qui fascinent et de la ronde d’enfants éclaireurs. Imagine que chaque mot conté ouvre des portes du passé, de ton passé, que tu puisses remonter à la source des histoires, de ton histoire. Te baigner dans cette connaissance nouvelle, comme un «baptême du monde par les mots». Ton monde.
Moi, je m’installe parmi tous ces gens, couverture sur les épaules, heureuse de voir les sourires dans les yeux autour de moi. Il reste des places sur les bancs, permets-toi de te sentir accueilli. Pleinement. Inconditionnellement... Bienvenue.
Rédigé à 08h18 | Lien permanent
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"Oui mes chères, vous avez raison de ne pas baisser la tête. Ne pas fermer les yeux. Ne pas différer le désir. Fixer plus que jamais l'obscur en déclenchant pour soi, en inventant pour tous des virgules de lumière.
Aucune douleur n'a de frontières
Aucune douleur ne demeure orpheline
Aucune souffrance infligée au vivant n'a de limite en elle.
Chacun de nous est une cible sans abri.
Une ligne de front et une antenne de transmission.
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etc.
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ce jour avec Patrick Chamoiseau, frères migrants.
Rédigé à 16h29 | Lien permanent
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Photographies : Stéphane Lagoutte.
Parce que certains savent que témoigner, c'est une lutte aussi.
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Il y a des mains tendues poings serrés, oui quand le mépris des nantis des puissants musellent par trop
quand la barbarie néo libérale écrase verrouille le monde, quand la police de la bonne conscience exécute ses sentences
mortifères .
Certains vont tambour battant, coeur au poignet, déterminés.
La violence, c'est parce qu'il n'y a pas de choix autre,
et devient conséquence pas finalité.
Fini les bonnes intentions, pour se faire entendre : agir.
Agitation des consciences, agitation de l'ordre quand établi, il écrase.
Redresser la tête, redresser les torts, offrir sa face à celle du monde : ils ont choisi.
Ne pas se morfondre, cesser la plainte, dire fort ce qui révolte, ce qu'ils refusent,
engagés sa souveraineté, celle qui les veut debout,
pas dégagés pas oubliés.
Histoire de respect, de laisser passer, de liberté foncière,
pas laisser faire, pas laisser couler, lutter corps à corps s'il faut.
agiter les solidarités combattantes.
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Rédigé à 15h38 | Lien permanent
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C'est un feu qui couve lentement tout au long du jour. Des brindilles copeaux de bois, des restes, de la sciure. C'est un feu sans flamme. La pluie ne l'apaise pas ni ne l'éteint. C'est un feu fumée blanche, lascive suivant le vent, ni dru ni puissant.
Mon père est mort voilà 9 jours.
Ma douleur a pris la forme de ce feu.
Rédigé à 18h46 | Lien permanent | Commentaires (0)
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cette part de merveilleux
c'est elle qui le porte
et parfois certains la rejoignent
elle rugit susurre tremble
et le monde avec elle.
fureur de vivance, tous ses vivariums
elle habite un continent, une terre avec
mille créatures, sa peau la lune luit la nuit
et ses airs de triomphe lui donnent bonne mine.
Elle est sauve des bois de mers
une forêt qu'on embrase
des lierres du silex une grange
une église.
elle est la femme qui partage mes jours.
Rédigé à 09h48 | Lien permanent
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Quelque chose comme qui dirait l'enfance
la maternité, la présence bruyante, les câlins jamais suffisants
Quelque chose comme des gestes quand ils soutiennent, rassurent, alimentent, aiment.
Quelque chose : une côte, un rein, un sein, une dune, un cap, une étendue d'eau radieuse,
la rade, le chenal, les cargos.
Quelque chose s'est passé, un soutien silencieux, porté par le chant de la vie,
Chuter sans tomber, consentir.
Rédigé à 09h29 | Lien permanent
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Un ciel noir inédit descend vers la terre que j'habite à présent, sans mon père.
Cela brouille un peu la vue ordinaire.
Une faiblesse qui étourdit
l'espérance du calme, l'attente de la fin, c'est fini.
On a vu l'obscurité, les copains nous aident à voir la clarté
majestueuse, autre forme d'abandon, quelques nuits partagées
dans des camps de fortune.
La vraie richesse.
Rédigé à 09h24 | Lien permanent
L'événement de ta mort a tout pulvérisé en moi.
Tout sauf le coeur.
Le coeur que tu m'as fait et que tu continues de me faire, de pétrir avec tes mains de disparue, d'apaiser avec ta voix de disparue, d'éclairer avec ton rire de disparue.
Rédigé à 13h36 | Lien permanent | Commentaires (0)
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Les jours d'après.
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Il doit préparer, mon fils, son concours d'entrée, ses chorégraphies, retrouver le goût du mouvement.
Mais après le confinement, le corps a besoin de retrouver le désir. Tout est à plat alors déplier, déplier.
Il vient ici à la maison, reviendra bientôt. Danse dehors et bientôt un espace à lui.
Je l'observe et ça me touche de voir ses mouvements de prince, qui l'emmènent plus loin
plus haut que lui.
je sais ce qui me sauve me laisse à flots me répare
dans ces jours d'après la mort de mon père
comme une longue célébration
le geste de mes enfants.
Rédigé à 08h17 | Lien permanent
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Les jours d'après.
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Pour se remettre en selle, faut regarder autour.
Dedans on voit bien, mais dehors ?
Ma fille est là, donnant un sacré coup de main, de pioche, de bêche,
des coups de tête, des sourires.
Elle ne chôme pas ou bien juste pour se rouler une clope.
Je la regarde.
Elle en tongue pour biner les patates.
je sais ce qui me sauve me laisse à flots me répare
dans ces jours d'après le décès de mon père
comme une longue célébration
le geste de mes enfants.
"Mais selon, un tour assez prévisible, cette insignifiance là se constitue en une signification nouvelle et majuscule : la bleu, l'insecte, la neige, tous les autres objets évoqués deviennent les termes d'une algèbre vide à l'aide desquels le poème se détourne du monde et se désigne infiniment lui même : l'absence suffisance et satisfaite"
Sarinagara. Philippe Forest
Rédigé à 08h03 | Lien permanent
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Les jours d'après (2)
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La journée est dense et ce sont des bouts épars de ma vie qui s'éclairent,
de la lumière dans les yeux même si j'ai l'air bien sérieux, presque grave.
Il y a dans la véranda, un nouveau cabinet de curiosité, c'est mon grand amour
qui sur le plateau miroir, vient déposer en chapelet des trouvailles figées, des vies qui furent
la vie ça dure.
Il y a une majesté dans ce geste et dans chacune des ailes de papillon.
La jouissance de la vie suppose toujours, la conscience de son infinie fragilité.
Je suis subjugué.
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"Toute son oeuvre n'est qu'un long attendrissement devant le monde et je conçois bien que cela ne suffise à le discréditer tout à fait. Il est bien le dernier des poètes. Cela signifie qu'il est le plus tardif des maîtres mais aussi le plus humble, le plus douteux, le moins respectable.
Tel qu'il l'observe, l'univers n'exprime que la grâce d'exister : le cheminement des fourmis sur le sol, le vol vain des papillons et des libellules, le chant gras des énormes cigales de sa terre, la compagnie aimante des créatures les plus vulnérables, l'épanouissement sexuel et sauvagement coloré des fleurs dans les champs lui sont des célébrations suffisantes. Oui, il n'y a pas d'autre grâce que celle d'être né.
Tout cela - cette légèreté enfantine - n'exclut d'ailleurs pas la pensée ni l'extase mélancolique de la sensibilité face à l'inflexible loi du temps.
La jouissance de la vie suppose toujours, chez Iui, la conscience de son infinie fragilité.
Tout plaisir fait signe ainsi vers la conscience sombre de son nécessaire anéantissement et rappelle à l'homme qu'il doit se résoudre au destin commun qui emporte et qui annule. Il y a parfois dans ses poèmes un peu de cette sagesse vaine et convenue. Par exemple :
" à mourir un jour - oui tiens-toi prêt tiens-toi prêt - les fleurs le répètent
Ce qui dit tout ou presque."
à propos du poète Issa.
Extrait de Sarinagara. Philippe Forest.
Rédigé à 07h26 | Lien permanent
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Les jours d'après (1).
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On est resté là dans le bleu profond du jour qui fout le camp.
Au cap qui est blanc sur la corniche dans l'herbe dodue, on a bu goulument la bière Raoul
pour célébrer ton absence, ton départ, ton souvenir et tutti quanti.
Au loin, des porte conteneurs, un ferry traversent le chenal, le vent nous ébouriffe.
On évoque celui de Godewarsvelde, la poutre de son garage dans sa maison d'Audinghem
On évoque les lignes brisées qui s'élargissent en chacun de nous
le tumulte des informations et comment on fait face à l'absence.
Le jour se retire, c'est limpide et clair, on marche, nos mollets en compote
On s'en va retrouver notre clan.
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Rédigé à 07h18 | Lien permanent
Rédigé à 07h51 | Lien permanent
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On a filé à toute allure jusque toi, traverser la France
ton souffle est court parfois il s'arrête.
Je suis avec Emma, ta grande petite fille, on te tient la main
On te parle (il existe une lumière dans la matière des mots)
Ton corps est beau, tes cheveux, ta peau ton buste fort.
Il y a une lutte pour la vie (à corps perdu) et tu l'as engagée voilà plus de deux mois. Covid.
Il y a eu le coma, puis sa sortie, et les mots que tu peux à nouveau prononcer :
de suite, les autres : "combien de morts ? Et à la maison, ça va ?"
Puis ensuite les jours avec et ceux sans, les reins, les infections, la force que tu ne parviens plus
à déployer.
Vendredi le 29 de mai, tu as attendu que l'on arrive
Et puis à bout de souffle, tu as arrêté de respirer.
vendredi, mon père est mort.
je le porte à présent en moi
je vais poursuivre notre conversation
Rédigé à 07h45 | Lien permanent