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Petite fille qui marche dans une grande flaque d'eau et de boue dans le campement d'exilés de Grande-Synthe.
Voilà ce qu'il faudrait dire seulement.
Pourtant petite fille, tu nous parles et même dans ton silence, tu cries.
C'est presque effrayant les cris que ça pousse une petite fille seule dans une flaque de boue.
Ce que tu nous adresses comme question, c'est simple :
"Votre politique vise à saboter délibérément nos vies et à nous infliger la détresse : sommes nous à ce point indésirables ? "
Je t'imagine grande, je t'imagine raconter ton histoire et dire ces mots à une assemblée qui viendrait juger des agissements de l'Europe au début du XXIème siècle.
En attendant.
En attendant, tu traverses cette flaque d'eau et je crois que c'est un moment d'insouciance.
Comme tous les enfants, tu joues à marcher dans l'eau, à marcher sur l'eau.
Ton insouciance, ce sont tes chaussettes, petite fille, qui seront mouillées et dont tu ne te soucies pas.
Car tu ne penses pas (pas trop j'espère) à tout ce qui te manque, la jolie commode dans une jolie chambre à toi, les habits propres pour se changer et le radiateur sur lequel faire sécher tes habits mouillés.
Mais dans ton sachet, il y a, ce que Camille, militante d'amour, a délicatement entreposé, trois feuilles jaunes et une boite de crayons de couleurs.
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Moi pour vivre, j'ai besoin de sentir battre ton coeur de petite fille insouciante.
Et c'est ça que tu m'offres aujourd'hui.
"Même blessée l'âme des choses s'offrent à nous sauver"
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(Tu avances // éclaire // échouée // dans cette friche // à coeur //ouvert // par ce souffle // qui scintille // sur le sentier des nerfs // pas seulement la nuit // mais la vie // sous la nuit. extrait d'un poème de Zéno Bianu)
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